Zbigniew Ziobro, le dirigeant du parti Solidarna Polska (Pologne Solidaire) et ministre de la justice polonais, craint dans un communiqué du 15 novembre 2020 repris par le quotidien “Le Monde”, que les Polonais soient “contraints, par exemple, d’introduire des mariages homosexuels, avec adoption d’enfants, avortement et euthanasie sur demande, des changements inacceptables dans l’éducation, la culture, dans la sphère du média ou des changements désintégrant l’État polonais dans le domaine de la justice”. C’est pourquoi il soutient le véto de la Pologne sur une partie du plan de relance européen de 750 milliards d’euros, en réaction à un projet d’acte législatif qui permettrait de ne pas verser à un État membre qui viole l’État de droit des aides de ce plan.
L’accord législatif entre le Parlement et le Conseil du 6 novembre dernier permettrait de suspendre le versement des aides européennes à un État s’il n’assure pas, par exemple, l’indépendance de la justice ou la lutte contre la fraude fiscale, qui sont des exigences de tout État de droit, c’est-à-dire un système dans lequel tous sont soumis au respect du droit La suspension de l’aide pourrait avoir lieu dès lors que ces violations portent atteinte ou risquent sérieusement de porter atteinte au budget de l’Union. Cela exclut donc des sujets comme le mariage des personnes de même sexe ou l’euthanasie, qui non seulement ne sont pas envisagés par le projet d’acte législatif, mais en plus n’ont pas vraiment de rapport avec les atteintes au budget de l’Union, ni d’ailleurs avec l’État de droit.
Ce qui est donc plutôt visé, c’est ce qui permet à une démocratie pluraliste de fonctionner correctement et dans le contexte de la crise sanitaire, l’indépendance de la justice ou le pluralisme des médias ont une importance particulière. En effet, avec un budget historique de 1824,3 milliards d’euro dont environ 160 milliards d’euros en subventions et prêts prévus pour la Pologne, il est nécessaire de garantir l’État de droit pour être en mesure par exemple d’examiner les agissements des autorités polonaises, comme l’avait fait, en Hongrie cette fois, le journaliste d’investigation Szabolcs Panyi dans l’affaire de détournement de fonds européens au profit du dirigeant hongrois Viktor Orban. Il en va de même pour l’indépendance des juges, consacrée par le droit de l’Union, permettant la protection des droits fondamentaux et, dans le cas présent, pour éviter la corruption en cas de détournements de fonds européens.
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